You are currently viewing Qualité de vie au travail – Récit d’une année d’expérimentation

Qualité de vie au travail – Récit d’une année d’expérimentation

  • Auteur/autrice de la publication :
  • Post category:QVT

Il y a un peu plus d’une semaine j’intervenais lors d’une matinée dédiée à la Qualité de Vie au Travail à Avignon. Cette matinée prend part à un projet de création d’un Living Lab, sous l’impulsion de la Communauté d’Agglomération du Grand Avignon. J’y ai rencontré des personnes fabuleuses, ai échangé avec elles sur leurs besoins, la réalité de la qualité de vie au travail (QVT pour les intimes).

Les discussions étaient tellement riches que j’ai eu envie de les partager avec vous. Vous retrouverez nos conversations résumées dans cet article en trois temps :

  • Un préambule sur la QVT
  • Une remise en contexte et des exemples de mon approche de la QVT cette dernière année
  • Les points abordés lors de la matinée à Avignon

Je glisse ici un grand merci à Bruno et Emmanuel qui m’ont fait confiance pour animer cet atelier. Merci également à Margot de la communauté d’agglomération d’Avignon pour son accueil et pour la magnifique démarche de Living Lab mise en oeuvre.

Préambule – Qu’est-ce que la QVT ?

Pour définir la QVT, je vous propose de reprendre la définition de l’ANACT – agence nationale de l’amélioration des conditions de travail.  L’ANACT définit ainsi 3 grands piliers de la qualité de vie au travail :

La QVT définie par l’ANACT. Source 
  • La capacité d’expression et d’action : est-ce que je peux m’exprimer, est-ce que le collectif me soutient etc…
  • Conditions d’emploi et de travail : quelles sont les conditions dans lesquelles je travaille au quotidien, en quoi celles-ci sont elles positives etc…
  • Contenu du travail : suis-je autonome, reconnait-on / m’octroie t-on des responsabilités, est-ce que je peux progresser dans mon travail etc…

 

 

1 an d’expérimentations sur la QVT

Pour planter rapidement le décor, je vous raconte mon propre vécu de la QVT.

Il y a plus de deux ans, j’ai commencé à m’intéresser à la psychologie positive. Mon intérêt était : comment rendre les gens heureux ? Comment créer un terreau favorable ?

Au fur et à mesure des mois qui passaient, je me suis de plus en plus penchée sur le rôle du collectif et des organisations. Je me posais des questions telles que :

  • Qu’est-ce qui est du ressort des organisations ou des individus ?
  • Quel rôle les organisations ont-elles à jouer dans l’épanouissement des individus ?
  • Comment créer un cadre de travail positif et qui permette l’épanouissement des personnes ?

Cette démarche de recherche m’a menée à :

  • Suivre un MOOC intense sur la Psychologie Positive : The Science of Happiness
  • Lire une belle quantité d’ouvrages sur le bonheur au travail (et m’abonner à un bon nombre de newsletters à ce sujet). Pour les lecteurs avides, rendez-vous ici.
  • Contacter une dizaine de Chief Happiness Officer pour comprendre leur métier. Vous trouverez une bonne partie des interviews dans la rubrique Articles de mon site.
  • Organiser un débat sur le métier de Chief Happiness Officer : bullshit job ou indispensable ?. Synthèse disponible ici 
  • Créer des discussions avec mon entourage professionnel à ces sujets
  • Prendre à temps très très partiel un rôle de Chief Happiness Officer dans mon organisation

En parallèle, j’ai lancé deux activités en parallèle qui m’ont permis, en plus de la démarche plus scientifique et de recherche, d’expérimenter des activités qui peuvent jouer un rôle dans la QVT :

  • Le yoga du rire, dont j’anime des séances depuis plus d’un an et demie
  • L’Antisava, jeu de conversation que nous avons co-créé avec Edith Maulandi au sein des Joyeux Audacieux

 

Les apprentissages de cette année d’expérimentation

1. L’individu et la structure ont un rôle tout aussi importants 

La structure et le management ont un rôle primordial à jouer dans la qualité de vie au travail. C’est eux qui peuvent poser un cadre qui, selon leur choix, sera contraignant voire oppressif pour les collaborateurs, ou épanouissant. L’ouvrage d’Alexander Kjerulf “Leading with Happiness” m’a beaucoup inspirée à ce sujet (lire ma synthèse de l’ouvrage ici).

Le modèle “servant leadership”, le leader au service des autres, est également une très belle inspiration dans le domaine.

Cependant, une organisation peut mettre en place toutes les conditions qui facilitent l’épanouissement des salariés et quand même avoir des personnes désengagées, malheureuses au travail. Chacun a un rôle prépondérant à jouer dans son propre épanouissement professionnel : nous devons tous être pro-actifs. 

2. Les outils c’est bien, le cadre avant c’est mieux

Dans les séances de yoga du rire que j’ai animées il y a eu des réussites (en grande majorité) et des questionnements. Il m’est arrivé d’animer une séance où j’étais présentée comme le quart d’heure fun de fin de journée. Dans cette séance, la direction regardait de loin et les collaborateurs ne savaient même pas pourquoi ils étaient là.

Résultat: j’ai animé un atelier très vivant et joyeux avec les 2/3 de participants motivés, et j’ai laissé le 1/3 qui n’avait pas envie de participer se restaurer.

Les séances suivantes, j’ai passé beaucoup plus de temps à expliquer le sens de l’exercice, à créer la confiance avec les participants, à expliquer à mon client comment introduire la séance auprès de ses équipes. Résultat : un engagement beaucoup plus fort.

Pensons au-delà de ce que nous avons envie de faire vivre à nos équipes. Posons le cadre. Introduisons des outils certes utiles, mais avec beaucoup de douceur.

Mise en action 

Quand nous avons lancé l’Antisava avec Edith, nous avons très rapidement créé un guide d’utilisation. Avec des règles pour ce jeu et des conseils sur la manière de l’introduire et de poser un cadre qui permette à chacun de faire vivre l’exercice de manière positive.

3. Prenons le temps 

Dans une démarche de QVT, les indicateurs vont surtout se mesurer sur le long-terme : fidélité des collaborateurs, diminution des absentéismes, augmentation de la productivité… pour n’en citer que quelques-uns.

Comme cette démarche est une démarche long-termiste, prenons le temps de nous poser et de réfléchir à ce qui est important.

Prenons le temps de nous demander “qu’est-ce que le plaisir au travail pour nous ?” avant de lancer une tripotée d’outils sans cadre. Prenons le temps de réfléchir avec nos collègues au sens collectif de cette démarche.

Dans ce sens nous lançons une expérimentation d’ateliers philosophiques sur ces thèmes avec ma partenaire de crime Sybille Lamson. Nous créons ce format d’ateliers pour discuter, entre collaborateurs d’une même entreprise ou inter-entreprise, de ce qui n’est pas urgent mais important. J’ai hâte de vous partager les résultats de cette démarche.

 

De ma démarche à une discussion collective : les questions abordées à Avignon 

Retour à notre matinée QVT.

Nous étions 25 dans la salle, avec autant de profils différents que de participants : gérant d’espace de coworking, dirigeant d’association, coach, indépendants, salariés d’entreprise ou d’organisations publiques, responsables de couveuses et encore plein de profils différents, tous rassemblés par l’envie de partager autour de la QVT.

Comment mettre en place une stratégie de QVT ?

La salle était divisée en 3 types de participants : ceux qui mettaient déjà des démarches QVT en place dans leurs organisations, ceux qui souhaitaient en mettre en place mais ne le faisaient pas encore, et des consultants / facilitateurs qui pouvaient proposer des outils pour mettre en place une telle démarche.

L’approche que nous avons retenue avec le dernier groupe avec lequel j’ai échangé était la suivante :

1. Mener un travail sur les valeurs de l’entreprise.

Partir des valeurs de l’entreprise et de son sens d’abord permettent de calibrer des actions et une stratégie QVT pertinente, et non sortie d’un chapeau magique

2. Incarner la QVT.

Les équipes dirigeantes ont un rôle de premiers à jouer : ils doivent incarner la stratégie dans leurs actions, leur style de management. Le but est ici d’éviter la “Bullshit QVT”. Une QVT de l’intention sans actions, frustrante pour tous.

3. Faciliter l’implication de chacun.

Certains ont partagé la mise en place de groupes de travail qui permettaient à chacun de réfléchir et de se positionner sur des axes QVT. D’autres le fait d’organiser des journées “partage ta passion” au bureau.

Ici nous avons différencié motivation et engagement. La motivation est l’envie de chacun de s’investir, et l’engagement le passage à l’action réel, la capacité à faire. L’idée est donc de faciliter la motivation et la capacité à s’engager de chacun.

 

Quel rôle pour la QVT dans la société ? 

En plus de partager des actions très concrètes et la dimension stratégique de la QVT, nous avons également dérivé sur le rôle de la QVT pour prévenir de plusieurs maux :

  • Le présentéisme 
    • Comment la QVT peut-elle favoriser une répartition juste et réellement efficace du temps de travail ? (Une des idées qui a été proposée dans les expérimentations à mettre en place sur le futur Living Lab était la journée de 5 heures)
  • Les risques psycho-sociaux, tels que le burn-out ou des extrêmes plus négatifs. En effet, la consolidation de la QVT en France s’est beaucoup faite suite à la vague de suicides de France Telecom et autres.
  • La culture de la perfection
    • Comment la QVT peut-elle permettre une culture de l’essai, une culture de l’échec où chacun peut tenter et se mettre en audace ? Comment la QVT peut-elle permettre à chacun d’être soi au travail sans devoir se mettre la pression d’un masque social ?

 

💡Ce que j’en retiens personnellement

  • Pour mes prochaines séances de yoga du rire, prendre encore plus de temps pour poser le cadre et m’assurer que l’intervention arrive au bon moment.
  • Lors de mes prochaines discussions sur le bonheur au travail, parler du sens et prendre mon temps.

📌Pour poursuivre la discussion

Je vous invite au prochain débat que je co-anime avec Edith Maulandi sur l’authenticité au travail le 10 janvier 2019. Inscriptions ici