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Facilitateurs, formateurs, quel est votre état d’esprit ?

Le 28 mai 2019 j’ai eu le grand plaisir d’animer une journée de Masterclass pour 50 entrepreneurs autour du thème “Comment développer son ouverture d’esprit”.

Pour cette journée j’ai replongé le nez dans une bonne partie de mes ouvrages et formations en psychologie positive. La demande de Hauts-de-France Innovation Développement était de permettre aux entrepreneurs de prendre du recul sur leur posture : comment faire face à leurs défis du quotidien avec une posture d’ouverture d’esprit et rebondir le plus aisément possible.

Pendant cette journée de formation je leur ai fait vivre de multiples ateliers, exercices d’introspection et leur ai donné des outils pratiques.

Le fil rouge de la journée était la théorie des états d’esprit de Carol Dweck, chercheuse en psychologie du développement à Stanford. Carole Dweck, qui a passé des années à étudier les conditions de réussite et d’échec de personnalités du monde politique, sportif, économique, mais également chez les étudiants et les enfants, catégorise les états d’esprits en 2 : 

  • L’état d’esprit de développement : celui où nous voyons tout comme des opportunités, sommes ouverts à les saisir.
  • L’état d’esprit fixe : où tout est figé, compétences comme faits. 

En préparant cette formation, je me suis beaucoup interrogée sur mon propre état d’esprit : comment appliquer un état d’esprit de développement avant / pendant / après mes facilitations. 

Voici donc plusieurs réflexions sur comment appliquer l’état d’esprit de développement dans le monde de la facilitation.

1. Dans les compétences et la personnalité

Faire régulièrement des bilans sur ses compétences et capacités de facilitateur : où en est-on, de manière honnête, quelles compétences a t’on envie de développer, de quoi sommes-nous fiers ? 

Un outil que j’utilise régulièrement (tous les 6 mois environ) est le diagnostic VIA Character, qui permet de classifier 24 traits de caractères / forces du plus signifiant au moins important. J’y reviens tous les 6 mois pour voir ce qui évolue, prendre du recul et me conforter ou réorienter mes actions.

Pour rester dans un état d’esprit de développement, il nous faut éviter les catégorisations : “je suis un facilitateur bordélique” “je suis un facilitateur cadré”. Dans plusieurs discussions la notion d‘”étirer” nos capacités est revenue : même si nous avons tous des “talents innés” ou des “défauts innés”, cela ne veut pas dire pour autant qu’ils sont figés dans le temps.

“Parfois, les gens avec l’état d’esprit de développement se déploient tellement qu’ils réalisent l’impossible”. Carol Dweck, Osez réussir

Nous avons cette responsabilité en tant que facilitateurs de savoir nous étirer, étirer nos capacités et nos compréhensions d’autres modes de fonctionnement que le nôtre. 

Boussole des Couleurs - Source : funnylearning.com

Un outil que j’utilise souvent avec des facilitateurs est la grille de lecture des 4 colors (développée par l’équipe de Funny Learning). Cet outil nous permet de nous positionner par rapport à nos styles dominants, naturels, appris et de voir nos points de progression. Pour en découvrir plus sur les 4 colors, vous pouvez aller découvrir les styles à ce lien.

2. Dans notre rapport à l’objectif

Particulièrement pour les facilitateurs et formateurs qui travaillent pour des organisations tierces / prennent des commandes, éviter piège du perfectionnisme est complexe : 

  • “J’ai envie de faire quelque chose qui les scotche au plafond et si je n’ai pas cela, je serai frustré”
  • “Ce n’est pas grave si je “sacrifie” toutes mes soirées à venir, les participants seront vraiment contents” 
  • “Si l’atelier ne réussit pas, c’est que je n’ai pas assez travaillé”

Dans ce genre de cas, je vous propose de réfléchir à la loi de Pareto :

  • Pour produire les premiers 80% du contenu, cela vous prendra 20% de votre énergie / temps 
  • Pour produire les prochains 20% de contenu utile, cela vous prendra 80% de votre énergie / temps 

Cela vaut-il vraiment la peine de refaire tous les pictos car il y a une légère différence de style ?

Mon avis personnel est que non. Je préfère mettre mon temps et mon énergie dans mon intention et la connexion avec les participants. Attention, cela ne veut pas dire négliger son travail. Il s’agit de trouver le juste équilibre entre “je fais cet effort de plus qui va être vraiment utile aux participants” et “je fais cet effort de plus car sinon j’aurais l’impression de ne pas avoir fait assez bien”.

3. Dans notre rapport au défi

Lors des ateliers et formations que nous animons il y a toujours des défis et moments complexes à gérer. Si on fait une rapide liste, cela pourrait être : 

  • Un participant désagréable 
  • Un participant pas d’accord avec le déroulé de la journée
  • Un groupe qui dépasse le cadre et se met à débattre 
  • Un lieu qui n’est pas du tout adapté…

L’état d’esprit de développement consiste à ce moment-là à affronter la difficulté. Ne pas la fuir. Ne pas agresser. Ne pas rester sidéré. Affronter et faire face à la difficulté. 

J’ai envie de vous poser cette question : quand avez-vous rencontré un défi pour la dernière fois dans un atelier ? Et comment l’avez-vous affronté ? Quelle était votre intention ? 

L’intention pour résoudre le défi sera utile si elle est centrée sur le groupe : comment est-ce que je peux résoudre ce défi pour aider le groupe à avancer ? 

Le groupe et vous êtes ensemble contre le défi. Ce n’est pas le groupe et le défi contre vous. 

Pour vous donner un exemple, il y a quelques mois j’ai animé un atelier d’intelligence collective pour un programme de développement des talents. L’après-midi était conçue autour de la communication du programme : comment mieux communiquer sur sa vision, aligner les mots. Après avoir présenté le contenu de l’après-midi j’ai, à mon habitude, demandé si tout le monde était d’accord. Et une participante a manifesté son désaccord.

Nous avons pris le temps en tant que groupe de comprendre le pourquoi. Il s’est avéré que cette participante (et d’autres) avaient besoin de partager également leurs ressentis sur le fond du programme, pour résoudre des frustrations rencontrées.

C’était un réel défi pour moi de ne pas passer en état d’esprit fixe, ne pas me remettre en question et ouvrir le champ des possibles. Et finalement en faisant cela l’après-midi a été extrêmement productive : nous avons un peu réadapté le contenu, pour traiter la demande et creuser le fond du sujet !

4. Dans notre rapport au temps 

L’état d’esprit fixe nous pousse à tout vouloir parfaitement et tout de suite. 

Comment pouvons-nous rester dans un état d’esprit de développement et admettre que certaines choses prennent du temps ? 

Par exemple, comment pouvons-nous expliquer à notre client que ce qu’il demande en une journée est inatteignable ? Comment pouvons-nous laisser de vrais temps de pause pendant nos ateliers pour que les participants aient le temps d’ingérer le contenu ? 

Comment pouvons-nous élaguer tout le contenu parasite (qui nous fait très plaisir et qu’on adorerait transmettre), mais qui n’est pas essentiel au déroulé de l’atelier ? 

5. Dans notre rapport aux relations 

Dans l’état d’esprit fixe, on cherche surtout des personnes qui nous rassurent : qui vont aller dans notre sens, ne pas nous confronter. Presque des béni oui-oui.

L’état d’esprit de développement nous pousse au contraire à chercher des pairs et mentors qui nous challengent, nous poussent au-delà de nos capacités et de nos connaissances. 

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Comment pouvons-nous nous entourer de co-facilitateurs et co-formateurs qui vont nous pousser à nous développer ? A voir plus loin que ce que nous savons de nous-mêmes ? 

Attention, cela ne veut pas dire tout le temps se faire bousculer : le feedback peut se faire à des temps choisis.

En conclusion, comment pouvons-nous, en tant que facilitateurs et formateurs, adopter un état d’esprit de développement ?